Crépitements

J'aurai voulu écrire un long article relou dont j'ai le secret. 

J'aurai voulu parler de l'indécence de la classe bourgeoise et de l'obscénité avec laquelle elle jette quelques centaines de millions d'euros sur la place médiatique lorsqu'un incendie taquine quelques poutres et vieilles caillasses. 

J'aurai voulu parler en parallèle de son indifférence, son désintéret pour les gens de peu et les gens de rien. 

J'aurai certainement voulu rappeler qu'elle est la première accaparatrice de richesses, et que les dons indécents dont elle se pare, en cette période où les inégalités nous explosent au visage comme la boutonneuse épiderme d'un ado qui aurait forcé sur la charcuterie bon marché, sont grassement relayés par les médias qu'elle possède. 

J'aurai voulu évoquer la diversion et la tentative ridicule et insultante d'union nationale autour d'un batiment encore fumant par notre cher président en culotte courte. 

J'aurai eu l'audace de parler, encore, des violences policières et de la complicité médiatique qui les accompagne. Du silence assourdissant de leur traitement et de la géométrie très variable des indignations. Luc Ferry je te vois. 

J'aurai bien-sûr parler du journaliste Gaspard Glanz, de son arrestation politique par la milice armée et du dédain avec lequel d'autres qui se prétendent journalistes ont, au mieux détourné le regard, au pire cherché des poux et dresser un procès en idéologie. 

J'aurai abordé cette vague autoritaire consentie, assumée et revendiquée par l'élite. Car elle emporte tout, conscience, empathie, amour propre, pour ne laisser qu'une bile homogène et crasse. 

Dans un élan (on est bien dans un élan), j'aurai surement affirmé sans ciller que le macronisme est un fascisme et qu'il suffit pour cela d'observer attentivement son état policier, sa presse servile et ses remparts bourgeois. 

Mais je vous épargnerais ça. Pas par retenue, c'est pas mon truc. Mais parce que les mots me manquent. Ça se passe essentiellement au niveau du bide et du palpitant. Ça s'agite. Ça s'agace. Ça bouillonne. Énormément. Les mots m'échappent. Je crois que je les ravale afin qu'on ne me les reproche pas. Ils semblent ne plus vouloir s’embarrasser d'aucun tact ni d'une quelconque diplomatie. Comme des cris instinctifs, des hurlements guerriers. Des ceux qu'on gueule avant l'impact. Des mots en rafales.

Alors pour vous éviter tout ça, j'ai décidé de n'en garder qu'un.

Feu. 

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